vendredi 12 août 2022

Parcourir le Chemin du Piémont Pyrénéen (1ère partie)

En été nous marchons... ou nous trouvons du temps pour ces activités qui le reste de l'année restent soumises à nos impératifs horaires.

Parlons de lecture aujourd'hui accompagnés par un joli texte écrit part Didier Guédon. En effet Didier partage avec nous un précieux témoignage de son pèlerinage au travers le Piémont Pyrénéen au mois de Juin dernier. Ses lignes reflètent avec justesse les sensations du marcheur qui, pleinement impliqué dans sa routine de marche, redécouvre le monde qui l'entoure d'une toute nouvelle façon.

Bonne lecture...

Parcourir le Piémont Pyrénéen (1ère partie)

La conviction m’avait rejoint que l’écriture permet de sédimenter les traces d’un vécu, tout particulièrement celui qui échappe à l’ordinaire des jours, et de faire face à la volatilisation et à l’effacement de toutes choses. Les outils de communication actuels ont fini par donner une primauté au visuel. Tout voyage, tout évènement, toute moisson est restitué dans une généreuse spontanéité en récit photographique. Retranscrire l’expérience organique est une invitation au partage dont les contours peuvent être multiformes comme les chemins parcourus. 

Une invitation sur mesure 

S’engager sur la voie du piémont, contreforts escortant la ligne centrale des sommets pyrénéens entre Carcassonne et Saint-Jean-Pied-de-Port, était comme un prolongement du grand cheminement conduisant à Assise en 2020, un chemin de pèlerins peu fréquenté où la nature est généreuse. La pandémie en a décidé autrement sur deux années. Peut-être à contretemps, 2022 laisse une place pour le départ, invitation à traverser une palette de terroirs entre Lauragais, Couserans, Comminges, Bigorre, Baronnies, Béarn et Pays basque au fil d’un chemin balisé de grande randonnée (GR 78), long d’environ 500 km, qui dessine laborieusement un axe de pérégrination séculaire entre Italie et Espagne, entre Rome et Compostelle, dans une noble quête de fuir l’asphalte. Cela ne suffira pas à ce que ce vieux ressenti fasse de temps à autres surface, marcheurs et voitures sont comme l’eau et l’huile (de moteur) !

La marche de Didier Guédon

De singuliers accueils "jacquaires" 

Cet itinéraire semble avoir été tracé pour des retrouvailles amicales, S. à proximité de Mirepoix, C. et G. à Saint-Girons, B. et R. à Arreau et familiales avec J. et E. à proximité de Lourdes. Des anges sont venus à ma rencontre pour des accueils pèlerins de luxe, des partages chaleureux qui redonnent de l’énergie et un décentrement stimulant. Gratitude à vous pour cette douce hospitalité.

Retrouver la confiance de l’itinérance 

Le kilomètre zéro prend place au pied de la Cité médiévale de Carcassonne à la chapelle Notre-Dame de la Santé située à l’extrémité du Pont-Vieux. Malgré l’heure, attention est donnée aux pèlerins connus pour être matineux, la chapelle est ouverte. Invitation à une demande d’intercession à la lumière d’une bougie photophore pour une protection en chemin. Tout chemin met le corps à l’épreuve et les grâces ne peuvent être que nourricières. 2 La brume recouvre la Cité endormie, le Pont-Vieux s’incline paresseusement vers l’Aude, il est temps de mettre les premiers pas au long des berges. La lumière s’imposera vite, le chant du rossignol philomèle suspendra soudainement le pas, un cerisier, à son tour, s’inclinera pour une offrande dans un paysage pourvoyeur de pain et de vin. Une journée s’accomplit en peu. 

Au temps où la marche était constitutive de l’humanité ! 

La brume matinale aura tenu ses promesses de fortes chaleurs attisées par un vent d’autant dont je fais brusquement connaissance. Elles m’accompagneront jusqu’au Mas-d’Azil au soir du cinquième jour. Sac à dos une dernière fois inutilement trop lourd, thermomètre accablant, la marche itinérante croit aux lendemains réparateurs et à la résilience corporelle. Certaines étapes sont tel un rendez-vous pris de longue date. À chacun ses récompenses ! Celle-ci était guettée, invitation à une plongée dans une histoire humaine vieille de 30 000 ans que l’on rejoint par un immense porche de 70 m de haut. Occasion heureuse de cueillir la fraîcheur dans cette grotte patiemment sculptée par les eaux de l’Arize!

Ici, point d’art pariétal mais un mobilier archéologique, silex et galets peints à l’ocre rouge, témoins silencieux de différentes périodes d’occupation. 

L’existence d’un joyau m’aura été livrée, celle d’un propulseur de chasse taillé dans du bois de renne voilà 15 000 ans nommé "le faon aux oiseaux", chapeau l’artiste ! Aujourd’hui, la lecture de l’œuvre est d’y voir une biche mettant bas, voilà qui me sied !

Négligence impardonnable, dans le cours de la marche, j’oublie la proximité de la grotte de Gargas et ses 200 mains négatives vieilles de près de 30 000 ans, record européen ! L’Homme devient sujet de l’art rupestre!

Crédit photo - Didier Guédon




Mystère fascinant des origines, des migrations aux quatre coins de la planète ! La marche, devenue progressivement l’oubliée au fil du siècle passé, aura été constitutive de cette aventure humaine. Nos paléoanthropologues dans une folle course au séquençage génétique de bouts d’os et de dents collectés estiment aujourd’hui que cinq espèces d’hominidés coexistaient il y a 50 000 ans (l’Homme de Neandertal, l’Homme de Denisova, l’Homme de Callao, l’Homme de Florès et nous même, l’Homme "intelligent, prudent et raisonnable", Sapiens au carré !). 40 000 ans plus tard, il n’en restait plus qu’une seule. Que s’est-il passé ? Les quatre autres espèces n’ont pas complètement disparues. Selon les coins du monde, elles ont laissé chacune quelques pourcents de gènes en héritage dans nos génomes, fruits d’unions fertiles. Dire que jusqu’au milieu du XIXème siècle, généalogies bibliques et celle du Christ selon les évangiles de Luc (3, 23-38) et de Matthieu (1, 11-16) faisaient remonter l’ancienneté de l’humanité à -4 000 avant l’ère chrétienne. Voilà pourquoi Cro-Magnon est devenu si célèbre, lui dont la découverte a tout bousculé en 1868 ! Mais revenons sur le chemin…

- FIN DU PREMIER EPISODE - 

NOUS VOUS INVITONS A DECOUVRIR, LE 19 AOUT PROCHAIN, LA SUITE!

3 commentaires:

  1. Encore une fois, que du bonheur de te lire. Merci Didier

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  2. merci de nous donner envie de suivre ce chemin

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  3. J’ai eu enfin le temps de lire ce beau récit. Quelle belle écriture. Merci Didier.

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