jeudi 20 mai 2021

Les Carnets d'un Hospitalier de Compostelle No 3: "Les marches"


J'ai, ce matin décidé de recompter les marches du jour. A 16h j'en étais plus ou moins à 800 ; j'ai arrêté le décompte. En haut en bas restera notre lot quotidien compte tenu de la configuration de l'hospitalité adossée à un abrupt de schiste. Il y a deux jours j'avais regardé , en vain, les moutons sauter, en pleine nuit, une barrière sans que cela m'apporte le sommeil.

Hasard, c'était le jour de l'Ascension, magnifique occasion de retrouver l'abbatiale dans sa verticalité et sa splendeur. Longue méditation sur la folie humaine qui est à l''origine de la ruine de Cluny. Des martinets volaient sous la croisée du transept, libres et prisonniers pourtant dans le firmament de la tour octogonale. Malgré le Covid il y avait foule mais dans le respect des fameuses règles sanitaires .Les chants étaient beaux et montaient sous la voûte.

Jour d'affluence à l'abbaye, grâce à la fête de l'Ascension. Les pèlerins étaient nombreux à l'office et piétinaient dans la cour, anxieux de rejoindre leurs chambres ou dortoirs. Un peu de bousculade et des escaliers pris d'assaut. Et pourtant le service des plateaux repas fut d'une fluidité étonnante, sans fausse note, à l'exception d'un groupe de six pèlerines qui ont accumulé les caprices,  les couvertures pas suffisantes, les desserts qui n'étaient pas à leur goût, puis le vin à resservir impérativement.  Pour quatre jours elles avaient déménagé  leurs maisons avec des malles cabine pesant chacune plus de 20 kg. Le lot habituel des récriminations sans conséquence pour les hospitaliers : " les fraiches sont troupes" n'est-ce pas?

Il a plu, bien sûr, à l'heure du repas; tout le monde a disparu dans les chambres pour dîner. Le ciel est descendu encore plus bas, cachant l'abbatiale et le froid du matin glaçait les corps fatigués par une longue journée. Et pourtant quel plaisir, quel privilège que celui d'être hospitalier à Conques. Demain je ferai le taxi pour quelques marcheurs et marcheuses (au diable l'écriture inclusive) pour les hisser au sommet de la vallée de l'autre côté du Dourdou, les rampes sont trempées, glissantes et dangereuses et les tendinites méritent des précautions: revenir sur un plateau en terrain plus plat avec de longues ondulations.




Le Christ sur la photo est d'une grande puissance expressive, où l'on retrouve la douleur et l'abandon


Henri ROUSSEL

1 commentaire:

Merci pour le commentaire que vous voudrez bien laisser sur cet article!