Chers Amis,
C'est le week-end !!!
Nous continuons, la publication, chaque week-end, des billets de notre ami Daniel, sur l'Histoire du Chemin, car même si c'est le temps d'être physiquement sur les chemins, c'est aussi le temps de mieux comprendre ce qui en fait aujourd'hui la valeur.
Bonne lecture!
Marc Ugolini
Président-Délégué
Saint Jacques apôtre de l'Occident ?
Pierre part s'installer à Rome et Jean à Éphèse, disions-nous récemment. Et Jacques ?
Les trois hommes, témoins privilégiés du Christ et quasi inséparables
Pierre, Jacques et Jean dorment au Jardin de Gethsémani(Mantegna)
dans les textes du Nouveau Testament, devaient marquer le christianisme de leur empreinte. Tous les trois présents au mont Thabor au moment de la Transfiguration et lors de la résurrection de Jaïre, présents lors de la pêche miraculeuse ou au jardin de Gethsémani, ils devaient tous trois laisser un souvenir indélébile à la postérité. À Pierre la fondation de l'Église Universelle ; à Jean la Mère de Dieu, l'Évangile et l'Apocalypse.
Et Jacques ?
En demandant à Jésus de faire siéger ses fils auprès de lui dans son royaume (Mt 20, 20-21) l'un à sa droite et l'autre à sa gauche, la femme de Zébédée (Marie Salomé) n'obtient pas satisfaction mais la prophétie va se réaliser : Jacques boira la coupe. L'Histoire retiendra cependant tout l'épisode : Pierre siègera au centre de l'empire (à Rome), Jean à l'Orient (en Asie) et Jacques à l'Occident (aux extrémités de la terre).
Une sorte de "Système Ptoléméen" géocentré sur Rome, correspondant à la vision du monde qu'avaient les pontifes du Moyen-âge : Éphèse et Compostelle "gravitant" autour de la Ville éternelle. Un peu comme si, zoomant sur l'Europe, les tombeaux de Pierre et de Jacques (apôtres de l'Occident) observaient celui de Marie-Madeleine (Apôtre des apôtres) à Saint-Maximin, étape centrale de notre Chemin provençal pour unir tous les pèlerins. Sorte d'équilibre subtil entre Galice et Latium… comme l'est Rome entre Compostelle et Éphèse ; entre Occident et Orient.
Mais Jacques est-il vraiment parti pour l'Espagne ?
Les anciens Ménologes (répertoires des fêtes et biographies succinctes des saints, version orientale des Martyrologes romains) ignorent saint Jacques. Or, la décollation du saint aurait eu lieu avant la dispersion laissant penser que Jacques prêchait en Palestine. Depuis longtemps qui plus est, puisqu'il avait été repéré par Hérode et arrêté en premier, avant-même Pierre. Les martyrologes combleront cette lacune mais il faudra attendre quelques siècles.
Un texte apocryphe du IIe-IIIe siècle "la Passion de Jacques", évoque la dispersion des apôtres et les contrées attribuées à chacun d'eux. Le texte insiste sur la prédication de Jacques à Jérusalem. Puis nous retombons sur Isidore de Séville (VIIIe siècle) rapportant le martyre de Jacques (le 8 des calendes d'août) et son ensevelissement à Achaia Marmarica. Une tradition syriaque reprise par les Coptes d'Égypte attribue à Jacques une "ville d'Inde" et à son frère Jean, l'Asie. Une version éthiopienne du texte indique que Jacques est enseveli à Kôt de Mâmrèkê (Achaia Marmarica ?). Jacques aurait-il évangélisé l'Orient ?
Vu de Constantinople (capitale de l'empire Byzantin incluant tout le bassin méditerranéen), l'Achaïe représente une région de la Grèce proche du Bosphore, voire, pour certains romains, la totalité du pays. Quant à la Marmarique, pouvant évoquer la mer de Marmara, elle désigne la bande de terre située entre la Libye et l'Égypte. Terre chrétienne évangélisée très tôt, de rite copte. À noter qu'il existe aussi un saint Jacques en Turquie : saint Jacques de Nisibe, évêque de la ville présent au Concile de Nicée en 325 (Martyrologe romain) mais surtout saint Jacques Baradée (Baradaï = guenille), sorte de saint François d'Assise qui parcourait alors tout l'Orient déguisé en mendiant, ordonnant diacres et évêques (VIe siècle).
Alors, l'Espagne ?
D'aucuns ont pensé que ce Jacques oriental pouvait être Jacques le Mineur dont on sait peu de choses. D'autres ont remarqué qu'une ancienne implantation grecque en Galice portait le joli nom de Tamarique. On remarquait aussi que la transmission écrite de l'énigmatique Achaia Marmarica, depuis la version originale du Bréviaire des Apôtres jusqu'à celle d'Isidore de Séville, avait fait l'objet de très nombreuses déformations (une dizaine, au moins, recensées), si bien qu'on pouvait tout à fait y lire arce marmarica, formule aussitôt traduite en latin galicien par arcis marmoricis (arcis = arche, et marmoricis = en marbre).
À suivre…Daniel Sénejoux
Passionnant ....comme l ensemble de tes écrits ! Merci Daniel !!!
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