Didier Guédon a parcouru le Chemin de Piémont Pyrénéen au mois de Juin dernier. Passionné de la nature, de la marche et convaincu des bienfaits que l'écriture a pour l'être humain, il partage avec nous le récit de son périple.
La semaine dernière nous partagions la première partie, une mise en bouche où ce brave pèlerin raconte sa mise en jambes, ses premières sensations et ses premières découvertes. Nous vous invitons à continuer sur ses pas, pour découvrir un aspect essentiel: l'acceptation de la solitude sur le Chemin…
Parcourir le Piémont Pyrénéen (2ème partie)
A l’approche des Pyrénées, la marche se doit être solitaire
Le rapprochement des Pyrénées s’accompagne d’un épais manteau nuageux. À quand le grand dévoilement des sommets ? Certains chemins non débroussaillés deviennent des fouillis fleuris où il faut se faufiler. Une ancolie solitaire m’interpelle, le rossignol a passé le témoin à la grive musicienne qui n’est pas en reste. Avec le chant des oiseaux, une élévation prend place. Dans ce temps solitaire au creux d’une hêtraie, s’arrêter, fermer les yeux et accueillir ces notes puissantes sifflées ou flûtées, dilatation, une boîte de Pandore s’ouvre ! La marche a tendance à nous clouer au sol, à nous maintenir dans l’horizontalité. L’oiseau nous redresse dans un espace généreux et offre un temps d’élévation. J’apprends qu’en cas de célibat prononcé, monsieur grive musicienne n’hésite pas à avoir recours au chant nocturne, du crépuscule à l’aube. J’en ai fait l’expérience ! Plus je marche et plus j’ai la conviction que celle-ci doit être solitaire, elle aide à trouver un centre de gravité durable…
Tous les ingrédients printaniers sont là et seule la météo peut troubler la plénitude. D’ailleurs, elle ne s’en est pas privée à l’approche du Portet-d’Aspet, grand déluge ! J’ai béni mille fois Claude qui m’a tendu un parapluie en quittant Saint-Girons, moi qui n’y avait jamais songé ! Après la canicule et le déluge d’hier, une vraie journée aimable pour le marcheur, ni accablante de soleil, ni sentant la baignade. Une fois le col du Portet-d’Aspet franchi où prenait place un rassemblement d’asphodèles, une salamandre profitant de l’humidité encore présente me ramène en Toscane sur le chemin d’Assise où je fis sa connaissance. Je n’ai pas encore croisé l’ours pyrénéen, seulement celui de Michelle, ma bienfaitrice d’hier qui m’a remis au sec. Demain, retrouvailles de Saint-Bertrand-de-Comminges…
Retrouver Saint-Bertrand-de-Comminges
Tout comme pour le Mas-d’Azil, un autre rendez-vous était marqué dans le marbre du chemin. La cathédrale Sainte-Marie se dresse dans le lointain horizon, vaisseau qui avait laissé son empreinte sur ma rétine lors d’une rencontre précédente comme un improbable dans un tel écrin de nature, fond vierge de contreforts pyrénéens. A l’approche, un autre joyau se fait jour, la basilique Saint-Just-deValcabrère. Ses proportions, sa discrétion, son roman à fleur de pierres dont je ne me lasserai jamais, les nombreux réemplois antiques de cette cité jadis romaine dans son architecture, son équilibre m’accueillent en plénitude. Renversement dans le fond de l’œil, la "petite" basilique éclipsera l’imposante cathédrale.
Le pèlerin découvre la Basilique Saint-Just-de-Valcabrère - Photo Didier Guédon
Au fil des jours, s’affirme cette constatation, l’effusion printanière n’est pas celle que j’attendais, elle n’est pas florale mais musicale, c’est un chant céleste qui est au rendez-vous. Une joie inattendue ! Les fleurs se sont-elles tenues en retrait pour laisser place à la plénitude du chant des oiseaux ? Seuls les orchis de Fusch, pyramidal et tacheté faisaient leur petit numéro de temps à autre. Les botanistes parlent de "stations", lieux où se concentrent des sujets d’une espèce végétale. En fin de floraison, les pivoines des jardins sont, quant à elles, tout ébouriffées. Le corps finira par être plus léger, l’esprit vagabond et le ciel s’affirmera bienveillant. Le pas s’est assagi, avoir fait le long chemin d’Assise met 4 en confiance sur des capacités encore présentes. Pourquoi se hâter, surtout quand les étapes sont courtes ? Toutefois, prévoir un post-it pour le prochain chemin : "pense à te retourner un peu plus souvent, cela peut te procurer un bonheur supplémentaire" ! Voilà 10 jours que je marche sans partage de chambrée ou de dortoir. À vrai dire, je n’en souffre pas ! Je sais via les témoignages abandonnés dans les livres d’or qu’une chaîne discrète de pèlerins s’étire le long de la voie, communion en esprit !
Laisser place à l’abandon, non pas dans une forme passive mais dans une acception de ce qui peut advenir. Long travail…
- FIN DU DEUXIEME EPISODE -
NOUS VOUS INVITONS A DECOUVRIR, LE 27 AOUT PROCHAIN, LA SUITE!
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