Pour celles et ceux qui auraient des doutes sur les averses et pluies qui tombent sans discontinuer sur Conques, la photo de l'âne quittant tristement l'abbaye servira de témoignage , s'il y avait encore un doute. Tout est alors plus compliqué pour les pèlerins, et par contre coup pour nous. Le hall bruisse des impatiences des marcheurs pressés d'aller trouver un repos bien mérité, et qui s'agglutinent à l'accueil, sans avoir dételé la mule, ni enlevé le harnachement qui dégouline, tandis que la boue s'incruste entre les dalles et macule les murs fraîchement repeints. Un tantinet d'énervement, de la bousculade, un peu, et des voix qui essaient de se faire entendre pour canaliser les arrivées vers la cour ou, du moins, l'avancée de l'étage.
Une "vieille dame indigne" de 83 ans se présente, sans forfanterie pour dire qu'elle en est à son septième pèlerinage, mais qu'elle n'ira qu'à St Jean Pied de Port cette fois ci. Elle raconte, en se forçant, ce qu'elle a fait et entrepris, tandis qu'une autre de 90 ans passés, accompagnée de ses filles dit la longueur des étapes qu'elle peut parcourir alors que sa progéniture de 60ans a, depuis longtemps déclaré forfait.
La cour ruisselle, la pluie fouette l'avancée, les pèlerins refluent vers le hall d'accueil. Je me remets à compter les marches pour aller à la chambre 12 : trois fois en dix minutes, hasard des arrivées. Je cours aux poubelles sous la pluie, j'ai augmenté ma collection de marches. Un marcheur arrive, à la recherche d'un hébergement que l'on ne peut, en principe, et en absolu lui assurer. Mais quand on connaît un peu la maison et ses ressources, une solution finit toujours par surgir. Malgré tout deux belges devront tirer des matelas dans le cloître pour avoir un abri après avoir refusé l'ermitage qui sentait trop l'urine des souris nombreuses dans ce lieu retiré.
La pluie redouble; il est 19h; tous aux abris pour l'heure du plateau repas. sous le auvent, sur la banque d'accueil, sur les genoux pour un repas froid. Mais tandis que l'on mange, en "back office", ils nettoient, trient, rangent en préparation de la vaisselle.
Il est 21h, seize heures que je suis debout; j'étais sorti sous la pluie, je remonte sous la pluie mais ragaillardi par une tisane améliorée à base de mirabelle, calvados et genepy. Le clocher lanterne de l'abbatiale est retourné à sa nuit, les projecteurs se sont éteints, nul son d'orgue ne sort au travers des grandes fenêtres. Un silence profond règne sur le village endormi.
Henri ROUSSEL
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